#05 - Intégrer l'éthique dès la construction d'une solution e-santé

Réglementation

Durée de l’épisode 00:33

Pour ce cinquième épisode, “100 Jours pour réussir” fait le focus sur l’intégration de l’éthique dès la construction d’une solution innovante en santé. 

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Voix Off : Cent jours pour réussir. C'est le podcast de G_NIUS, le Guichet national de l'innovation et des usages en e-santé. Autour de Lionel Reichardt, retrouvez les innovateurs de la e-santé et les experts incontournables pour vous aider à réussir dans vos projets.

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Lionel Reichardt: Bonjour à tous et bienvenue sur le podcast cent jours pour réussir le podcast à destination des innovateurs et entrepreneurs dans le numérique en santé, mais aussi de toute personne curieuse de ce domaine. Dans cet épisode, nous parlerons de l'intégration de l'éthique dans la construction d'une solution innovante en santé. Pour ce faire, nous recevons Paul-Louis Belletante, fondateur et dirigeant de BETTERISE, une plateforme de services digitaux en santé. Nous recevons également Brigitte Seroussi, professeur des universités, praticien hospitalier à l'APHP et chargé de mission au sein de la cellule éthique de la délégation ministérielle au numérique en santé.

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Lionel Reichardt: Paul-Louis Belletante Bonjour et merci de partager avec nous votre expérience. Pouvez-vous tout d'abord nous présenter votre formation et votre parcours?

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Paul Louis Belletante: Je suis issu d'une formation commerce ingénierie. Je me suis rapidement tourné vers l'entrepreneuriat dès le début de ma carrière professionnelle. J'ai eu la chance de créer plusieurs sociétés dans le numérique et je me suis tourné vers le monde de la santé, vers le monde de la santé numérique en 2013, avec la création de BETTERISE.

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Lionel Reichardt: Vous dirigez la Société BETTERISE, une société créée en 2013. Pouvez-vous nous la présenter?

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Paul Louis Belletante: BETTERISE est une société qui édite des solutions qui permettent aux soignants de soigner leurs patients à distance. On propose un grand nombre de solutions qui vont donc permettre aux médecins, aux infirmiers de suivre leurs patients à distance, de détecter d'éventuelles complications chez ses patients et surtout d'accompagner ses patients à distance dans une meilleure compréhension de leur traitement, dans une meilleure compréhension de leur maladie et surtout de les aider à comprendre ce qu'il faut faire au quotidien pour mieux vivre.

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Lionel Reichardt: Vous êtes donc une société de soins numériques dans le secteur médical. L'éthique est une composante très importante. Comment définissez-vous l'éthique au quotidien?

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Paul Louis Belletante: Pour moi, l'éthique, c'est avant tout des actes plutôt que des discours. J'insiste sur le sujet parce qu'effectivement, on est dans un monde de santé numérique et numérique où il ne peut y avoir beaucoup de sociétés de type startups qui évoluent. L'éthique est souvent utilisée comme un beau discours, mais derrière il n'y a pas beaucoup d'actes. La santé est un domaine tout à fait particulier dans lequel entreprendre. Parce que la santé, bien évidemment, au bout, il y a des patients et l'éthique doit faire partie intégrante de l'ensemble des procédures de la société qui sont utilisées pour mettre en place un produit. L'éthique, ce n'est pas juste un label. L'éthique, ce n'est pas juste une posture. L'éthique doit être infusée dans chacune des procédures de l'entreprise, que soient des procédures RH, que ce soit des procédures de gestion commerciale que ça soit des procédures de développement, de tests, de gestion de la société au quotidien. Sans éthique il n'y a pas de soins numériques parce que sans éthique, on met les patients en danger.

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Lionel Reichardt: Quand et comment avez vous intégré l'éthique dans votre projet?

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Paul Louis Belletante: Alors nous, on a vraiment eu de deux parties chez BETTERISE. On a eu une première partie 2013- 2017 où pour trouver des financements on a choisi d'avoir des clients plutôt que de lever des fonds. On s'est plutôt tourné vers des thématiques de bien être, de prévention primaire, de wellness. A ce moment-là, effectivement, l'éthique était quelque chose d'important pour nous. Mais on essayait de faire des choses bien, conformément aux différents textes que l'on pouvait connaître à l'époque. Mais notre priorité était avant tout de livrer nos clients, principalement dans le monde de l'assurance. En 2017, on a pu faire un véritable virage vers le monde médical parce que notre expérience avait été faite dans le monde de la prévention primaire et on a choisi de tout refaire. On a tout refait à zéro. On a refait l'intégralité de notre plateforme technique, on a repris l'intégralité de nos procédures. Tout ceci pour correspondre à la réglementation en vigueur, tout simplement. Vous savez, il y a un moment dans une vie de la société où on prend du recul, on se dit voilà dans trois ans ou est ce qu'on veut être. On s'est rendu compte en 2017 que si on voulait être prêt au rendez-vous pour proposer des soins numériques en 2020 et on y est maintenant, il y avait des réglementations à suivre. Le RGPD, bien évidemment, en ce qui concernait le traitement des données et bien évidemment également le Règlement européen sur les dispositifs médicaux qui est issue en 2017 sur la base de ce règlement qui entre en vigueur en mai prochain. Il y a toujours un temps d'entrée en vigueur sur ces règlements. Nous avons repris l'intégralité des procédures de nos sociétés en terme encore une fois de développement, en termes de conception, en termes de gestion commerciale, en termes de gestion des fournisseurs. On a internalisé beaucoup de choses et on a intégralement tout redévelopper nos services pour être sûr de proposer les services avec la meilleure qualité aux soignants et, in fine, aux patients.

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Lionel Reichardt: Comment l'éthique se matérialise t-elle au sein de votre équipe aujourd'hui? S'agit il de normes à respecter, de valeurs à partager?

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Lionel Reichardt: Ce qui est important de voir dans l'éthique, c'est bien souvent quand on parle avec des gens, l'éthique reste assez vague. Donc, c'est important de cadrer ce que c'est que l'éthique déjà. Pour nous, l'éthique, c'est de mettre en place tout ce que l'on peut pour respecter le patient et assurer sa sécurité. C'est à ce titre qu'ensuite on peut proposer des services qui vont lui permettre d'améliorer sa santé, puisqu'aujourd'hui, on est vraiment sur de la fabrication de véritables dispositifs médicaux certifiés auprès de la NSM, qui ont des revendications cliniques étayées par des évaluations cliniques et qui ont des bénéfices cliniques tels que des allongement de la durée de vie qui sont reconnus et revendiqués. Quand on a ces promesses là, beaucoup de gens nous disent oui, mais effectivement, comment vous faites? Quel est le cadre? Et ce que vous faites appel à des labels ou des choses? Encore une fois, notre réponse est assez simple pas besoin de label spécifique. Aujourd'hui, il y a des réglementations européennes qui sont extraordinairement claires, extraordinairement précises. Elles sont très simples à suivre et ces réglementations sont souvent basées sur des normes, des normes internationales, des normes ISO qu'il suffit, notez les guillemets "de suivre" pour être sûr que l'ensemble des procédures de votre société respecte les attentes internationales, les exigences réglementaires internationales. A ce titre, nous sommes allés chercher des certifications. Nous sommes certifié ISO 13 485 sur la qualité dans la conception, la distribution et le déploiement de dispositifs médicaux. Et donc, nous avons des certifications. Nous faisons certifier nos produits comme étant des dispositifs médicaux par des organismes notifiés et à ce titre, nous pouvons revendiquer effectivement ces bénéfices cliniques et nous pouvons garantir à nos partenaires, à nos clients, que ces services sont fiables, sont sécurisés et avant toute chose vont respecter le patient, vont respecter la sécurité du patient et vont permettre effectivement aux soignants de soigner les patients à distance.

00:07:13
Lionel Reichardt: L'éthique se porte surtout autour du patient et de la donnée. Qu'est ce qu'une gestion éthique de la donnée pour une société du secteur du numérique en santé?

00:07:21
Paul Louis Belletante: En premier lieu, c'est de s'assurer que le traitement de la donnée n'a qu'un seul but premier, c'est celui, principal, d'améliorer la santé du patient ou de permettre aux soignants de mieux soigner son patient. Le principal traitement de données doit être fait autour de ça. Si vous changez de cap en vous disant j'emmagasine effectivement beaucoup de données pour ensuite pouvoir les revendre pour baser mon modèle économique dessus, vous vous dévoyées de votre mission principale.

00:07:49
Paul Louis Belletante: Il y a une chose qui doit rester ancrée dans l'esprit de l'ensemble de nos collaborateurs, c'est que nous faisons tout cela pour améliorer la santé des patients. Donc, tout traitement et j'insiste là dessus, qui doit être fait autour des données du patient, doit servir ce but principal. Tout autre traitement ne doit pas être autorisé, ne doit pas être, ne doit pas être conçu au sein de la société ou en tout cas étudié avec la plus extrême prudence et ne doit jamais nous éloigner notre but parce qu'après, si on fait des services numériques en santé pour récolter de la data pour la vendre ensuite, c'est tout à fait différent que de faire des services numériques en santé pour soigner les patients. Donc, effectivement, le traitement des données est extraordinairement important. Ce traitement est très cadré par notamment par le RGPD et à ce titre, j'en reviens pardon aux certifications et au suivi du réglementaire, mais tout est très précisément inscrit dans les textes de loi sur cette partie traitement des données, ce qu'on a le droit de faire avec une donnée de santé. J'invite aussi l'ensemble des personnes qui travaillent sur ces sujets à se rapprocher du Code de la santé publique, notamment qui cadre beaucoup de choses et bien évidemment, toute la documentation qui est disponible sur G_NIUS ou tout autre outil qui nous accompagne. Il y a beaucoup de choses qui sont écrites. Les entrepreneurs dans ce monde de la santé ne sont pas laissés seuls. C'est quelque chose contre laquelle on se bat. Tout est écrit, tout est cadré et tout est extrêmement clair. Ce que vous avez le droit de faire ou pas est extrêmement clair. Il suffit de le suivre et si vous rajoutez en sus, au dessus de ça cette notion de se dire que seul l'intérêt du patient prime vous êtes à peu près assuré de faire les choses bien.

00:09:26
Lionel Reichardt: Vous vous posez des questions sur comment intégrer l'éthique dès la construction de solutions innovantes en santé. Eléments de réponse avec Brigitte Seroussi, professeur des universités, praticien hospitalier l'APHP et chargée de mission au sein de la cellule éthique de la Délégation ministérielle au numérique en santé du ministère de la Santé et de la Prévention, Brigitte. Bonjour et merci de partager votre regard sur cette question de l'éthique. Tout d'abord, en quoi consiste la cellule éthique de la délégation du numérique en santé?

00:09:59
Brigitte Séroussi: Cette cellule de l'éthique du numérique en santé, elle vise finalement à installer le virage du numérique en santé dans un cadre éthique, c'est à dire qu'il ne s'agit pas d'avoir que des outils et des services numériques. L'idée, c'est d'insérer l'éthique dans ses pratiques et de l'insérer le plus en amont possible. Donc, finalement, l'idée, c'est de développer des méthodes et des outils qui vont mesurer cette éthique du numérique en santé, sachant que la définition d'éthique du numérique en santé on peut dire que c'est finalement le croisement des bénéfices de l'éthique médicale et des bénéfices du numérique en laissant de côté les risques du numérique. Les bénéfices de l'éthique médicale, c'est l'autonomie, la justice, la bienfaisance et la non malfaisance. Les risques du numérique, on va peut être les voir. Les bénéfices, on les connaît c'est la qualité des soins, la meilleure coordination des acteurs, les risques. C'est finalement les choses qui vont avec le numérique, notamment en matière de données, c'est à dire qu'en fait, c'est un progrès numérique. Mais si les informations et le voyage pour la coordination des soins, ça peut poser aussi un problème aux patients et aussi aux professionnels de santé pour savoir jusqu'où est le voyage est dans les mains de qui elle voyage. L'idée, c'est de proposer des garde-fous pragmatiques qui permettent de mesurer ça, d'être transparent sur ces gardes-fous et de générer la confiance de l'ensemble des acteurs de l'écosystème.

00:11:32
Lionel Reichardt: Vous avez effectivement défini ces notions d'éthique en santé. Comment les intégrer ensuite dans un projet innovant?

00:11:38
Brigitte Séroussi: On a justement, au sein de cette cellule du numérique en santé un certain nombre de groupes de travail, dont un groupe de travail qui concerne ce sujet là. Son intitulé c'est éthics by Design. Il est piloté par David Gruson. L'objectif, c'est de proposer un guide de bonnes pratiques pour justement intégrer la dimension éthique dans les solutions via le plus en amont possible, donc, puisque c'est by design. Alors, en fait, on a proposé une segmentation en quatre, en quatre rubriques de la construction d'une solution lien en santé avec la partie, collecte des données et traitement des données, construction d'un algorithme, évaluation de l'algorithmique et la préparation de la mise en production et finalement, au niveau de ces quatre rubriques. L'idée, c'est de questionner parce que l'éthique, c'est essentiellement un questionnement. Par exemple, sur la collecte des données, on va se dire, est ce que vous avez bien choisi les données de façon à représenter le mieux possible la population cible, c'est à dire ce que les données de votre population d'analyse correspondent bien à la population cible sur laquelle vous voulez appliquer la solution IA vous êtes en train de développer, alors ça, ça vise essentiellement à limiter les biais. On a beaucoup entendu que l'IA était raciste, notamment l'IA en santé, parce que finalement, on n'a pas une représentativité de la population d'analyses par rapport à la population cible de l'utilisation de la solution. Et puis, il y a autre chose aussi il y a plus d'éthique, il va y avoir, est ce qu'on est bien en rapport avec la finalité? Est ce qu'on utilise bien les données qui vont servir la finalité de la solution D'IA? Est ce qu'on n'a pas trop de données? Est ce qu'on a les bonnes données? Donc il y a tous ces questionnements. Et puis, il y a aussi le fait d'embarquer dès le début de la construction, l'ensemble des acteurs qui vont être concernés par la solution, notamment les patients et les professionnels de santé dans un conseil scientifique et éthique qui permettra finalement d'accompagner les différentes étapes de leur construction. Et puis, il y a plein d'autres tas d'autres éléments qui font l'objet de ce guide de bonnes pratiques et qu'on va publier assez rapidement pour pouvoir justement avoir des pistes de questionnement à chaque étape de la construction de la solution IA

00:13:56
Lionel Reichardt: Cette notion d'éthique entre-elle en résonance avec la question de la démocratie en santé.

00:14:01
Brigitte Séroussi: Alors oui, évidemment, puisque déjà, ce que je disais précédemment, c'est que il faut que les patients, on parle de démocratie sanitaire, c'est à dire le fait que les patients soient vraiment à bord au niveau des choix, mais aussi des décisions. Donc, moi, ce que je comprends, c'est que votre question vise par exemple ce conseil scientifique et éthique, mais également au niveau des solutions d'IA. C'est vrai que le principe de l'éthique médicale, qui est l'autonomie, il va se centrer notamment sur l'autonomie décisionnelle. Et ce qui est important, c'est que cette autonomie décisionnelle du professionnel de santé soit conservée. C'est ce qui est dans le projet de loi de bioéthique dans l'article 11. C'est la garantie humaine. Ou est ce que ça va servir la démocratie sanitaire? C'est parce que les patients en fait on leur doit une explication. D'abord, on leur doit une information sur le fait que c'est un outil d'intelligence artificielle a été utilisé pour aider les professionnels de santé à décider au mieux de la prise en charge de son patient. Donc, c'est cette transparence qui il est important de bien avoir en tête. Mais au-delà de la transparence, il y a aussi un devoir d'information et d'explication. Donc, les startuppers et les industriels éditeurs de solutions liées en santé, il faut bien qu'ils aient en tête le fait que lorsqu'ils développent une solution, cette solution, elle doit effectivement pouvoir expliquer ce qu'elle fait. Alors, expliquer ce qu'elle fait, ce n'est pas toujours facile, mais en tout cas, il faut expliquer l'explicable et identifier la zone non explicable de façon à être totalement transparente. Souvent, les solutions d'IA actuellement sont des solutions qui apprennent à partir de données massives des algorithmes qui permettent de discriminer entre une mammographie avec un cancer et une mammographie sans cancer, ou bien entre des solutions qui vont être plus en faveur de certaines prises en charge par rapport à d'autres. Il y a des choses qui sont explicables parce que dans les méthodes qui sont développées, il y a des variables qui apparaissent comme étant importantes dans la décision. Mais il y a des choses qui ne sont pas explicables, cette explicabilité est due au patient au moment de la décision. Elle est due également aux professionnels de santé pour qu'ils construisent la sienne et pour qu'il la transmette finalement comme une recommandation à son patient.

00:16:32
Lionel Reichardt: L'éthique peut être vue comme une contrainte pour les porteurs de projets. Mais quelles en sont justement les bénéfices et les opportunités pour mener un projet innovant?

00:16:40
Brigitte Séroussi: Je ne suis pas d'accord avec vous sur le fait que ce soit une contrainte. Je pense que c'est une opportunité et c'est comme ça que les développeurs de solutions doivent le prendre. En tout cas, ça peut paraître une contrainte sur le court terme parce que c'est effectivement des choses qu'il faut intégrer dans le processus de construction de la solution. Mais sur le long terme, c'est gagnant. Et moi, je crois que d'avoir des garde-fous éthiques, c'est absolument pas un frein à l'innovation et c'est très gagnant sur le long terme. C'est à dire qu'en fait, cette solution là, elle trouvera son public, elle trouvera ses utilisateurs parce que, justement, elle aura l'éthique intégrée dans son dans son approche.

00:17:24
Lionel Reichardt: Nous voici de retour avec vous. Paul-Louis Belletante, dirigeant de la société BETTERISE, Brigitte Séroussi aussi que nous venons d'entendre dire que l'éthique naît d'un questionnement. Quel a été ce questionnement pour vous? Comment avez vous répondu? Avec qui étiez vous accompagner?

00:17:39
Paul Louis Belletante: On est accompagnés par des gens dont c'est le métier. Justement, ce respect des exigences réglementaires. Pardon, j'insiste vraiment sur le respect de ces exigences réglementaires parce que ça nous permet de cadrer vraiment ce débat. L'éthique, c'est de faire les choses bien pour faire les choses bien il existe des règlements qui sont basés sur des normes. Donc, si vous êtes accompagnés par des gens compétents dans le respect de ces normes qui vont vous aider à vous poser effectivement les bonnes questions sur est ce que j'ai le droit de faire, ça.? Est ce que je peux faire ça? Quel est le meilleur moyen dans un processus d'amélioration continue de faire ça? Vous avez toutes les clés pour réussir le questionnement effectivement, il doit être central, c'est à dire que la santé numérique ne peut pas être traitée comme un autre comme tout autre sujet. Il faut vraiment se poser les bonnes questions en se disant, j'ai vraiment mettre une question qui peut paraître très simpliste mais je pense qu'elle est oubliée de beaucoup sur le marché de la santé numérique, c'est ce que j'ai le droit de faire ça? Est ce que j'ai le droit de commercialiser ce produit ? Aujourd'hui, loin de moi l'idée de critiquer ce marché parce qu'on en est un acteur, on sait combien c'est compliqué. Mais je trouve qu'il y a beaucoup trop d'entrepreneurs où il y a beaucoup trop de sociétés qui ne sont pas assez sensibilisées sur ces questions de respect réglementaire. C'est assez effrayant parce que ça fait courir un vrai risque à leur société, mais également aux patients. Aujourd'hui, notamment sur des solutions de télé-suivi dès lors que vous avez un traitement de la donnée qui va aider au diagnostic d'un médecin, quand je parle de traitement de la donnée, je ne parle pas d'intelligence artificielle ou autre. Je parle juste d'analyser data pour faire remonter une petite vignette orange ou rouge à côté d'une data pour que l'attention du médecin soit portée sur cette data là. Vous êtes considéré comme un outil qui va aider au diagnosticd'un médecin donc vous êtes considéré comme un dispositif médical et il faut aller chercher ces certifications de dispositif médical. Il faut faire des démarches, sinon tout simplement vous n'avez pas le droit d'exercer. Les bonnes questions à se poser sont celles ci, il faut absolument être accompagné sur ces questions effectivement, parce que c'est quelque chose qui est assez conséquent à digérer

00:19:53
Paul Louis Belletante: Mais la question n'est pas de savoir est ce qu'il y a une alternative à ça, non, pas du tout. Poser les bonnes questions, est ce que vous avez le droit de le faire? Faites vous accompagner pour être sûr de pouvoir faire ou pas. Les réponses sont assez binaires. Aujourd'hui on entend beaucoup sur le marché oui mais il y a une tolérance. Il n'y a pas de tolérance. Il n'y a pas de tolérance en termes de réglementaires et encore moins de tolérance en termes de réglementaires sur la santé. Donc oui, il faut se faire accompagner parce que sinon vous allez faire des produits qui n'ont pas le droit de cité, qui n'ont pas le droit d'être commercialisés. Et les contrôles commencent à s'intensifier et c'est très bien pour le marché parce qu'il y a plein d'acteurs qui font les choses bien. Les contrôles vont s'intensifier. Attention au retour de bâton des organismes de contrôle qui vont auditer bon nombre de solutions qui aujourd'hui ne respectent pas ces exigences réglementaires. Donc, si on veut faire de l'éthique en santé, commençons déjà à respecter les exigences réglementaires.

00:20:45
Lionel Reichardt: Est ce que l'éthique, justement, c'est la compliance?

00:20:47
Paul Louis Belletante: La compliance fait partie de l'éthique. Après, vous avez deux manières de suivre ça, c'est à dire que vous pouvez faire votre travail de compagnon de ces minimas. Je respecte les règles et puis finalement, je fais des dossiers qui seront transmis aux organismes et ça suffit. Je pense que l'éthique, si je peux me permettre, c'est de la compliance plus de l'humain, c'est à dire que vous faites les choses bien et ensuite vous rajouter en plus une couche d'humain en disant finalement je fais ça que pour soigner des gens, pour permettre à d'autres de soigner des gens et donc je me mets toujours à la place du patient. Je rajoute une couche d'humain à cette couche réglementaire. Et pour moi, c'est ça l'éthique. Pourquoi on entreprend dans le domaine du soin numérique? C'est parce que c'est finalement la plus belle des missions. Certaines personnes me disent oui, mais c'est aussi un marché où il y a beaucoup de valeur. Oui, heureusement qu'il y a de la valeur parce que si une société ne donne pas de la valeur à tout ce qui permet d'améliorer la santé de l'ensemble des citoyens d'un pays ou d'une planète, c'est que le monde marche sur la tête. Mais il y a énormément de secteurs beaucoup plus simples à entreprendre que celui de la santé. Je pense que si on entre dans le domaine de la santé, c'est parce qu'on a envie quand même de faire des choses. On envie d'améliorer finalement la condition de l'ensemble des citoyens et ça passe par cette envie d'améliorer l'humain et d'accompagner l'humain. Je pense que l'éthique c'est effectivement bien évidemment une vraie bonne couche de compliance et ensuite une bonne dose d'humour.

00:22:23
Lionel Reichardt: Si c'est de l'humain et si c'est une valeur, comment faire pour s'assurer que cela est bien partagé au sein d'une équipe? Avez-vous un groupe de travail? Organisez vous des réunions régulières? Le prenez-vous en compte dans votre recrutement?

00:22:34
Paul Louis Belletante: C'est effectivement un point qu'il faut aborder. Ce n'est pas le point le plus simple, mais encore une fois l'humain change tout. C'est à dire que le cadre compliance, il est cadré par nos procédures. Ces procédures sont audités régulièrement. Ces procédures sont certifiées, donc les collaborateurs doivent suivre ces procédures. C'est un travail de tous les jours de leur présenter les procédures, de faire respecter ces procédures et de s'assurer que l'ensemble des actions de la société sont faites conformément aux procédures qui sont annoncées. C'est un travail, je vais dire un peu à peu classique de cadrage de société. Ensuite, il y a toujours ce petit côté humain encore une fois, ça se fait au quotidien, ça se fait dans chaque échange, ça se fait dans chaque mail, dans chaque, dans chaque coup de fil avec l'un des collaborateurs. Ne jamais accepter aucune incartade dans la conception, dans la réflexion, dans des pensées échangées en réunion qui permettent de penser à un moment donné à un collaborateur que l'intérêt premier de la société n'est pas que le patient qui utilise l'un de nos services, est celui qui prime avant tout. Donc, ça se passe vraiment au quotidien et ça se passe donc par des remarques quotidiennes auprès des collaborateurs et au niveau du recrutement. Ça se passe aussi par cette sensation de, pardon je vai parler de feeling, mais parce qu'on est dans de l'humain par ces échanges et par se dire est ce que la personne qui est en face de moi porte des bonnes valeurs.

00:24:11
Paul Louis Belletante: Au-delà du CV, il faut échanger avec la personne que vous allez recruter. Poser les bonnes questions, pas forcément sur les formations, sur ce qu'elle a fait, mais comment elle voit les choses. Quand vous présentez votre métier, comment elle réagit. Et si cette personne a cette petite dose d'humain, si cette personne a cette envie de faire les choses bien et on sent bien si c'est un discours de façade ou si c'est vraiment une vraie valeur qui est ancrée en la personne. C'est une bonne personne. Et si les compétences vont avec effectivement, c'est une bonne personne à recruter.

00:24:46
Lionel Reichardt: Faut-il faire incarner cette éthique dans un comité éthique ou un comité scientifique?

00:24:50
Paul Louis Belletante: Effectivement, il faut toujours s'entourer. Il faut toujours aller chercher de l'information. Je reviens encore sur G_NIUS, pardon, mais c'est aussi le but de ces épisodes. Il y a beaucoup d'informations. Il y a beaucoup de gens qui sont disponibles aujourd'hui sur le marché, que ce soit auprès d'organismes privés, que ce soit auprès du ministère, des délégations du numérique en santé, de l'Agence du numérique en santé, de G_NIUS, etc. Etc. Qui sont prêts à répondre à vos questions, qui sont prêts à construire avec vous ce marché de la e-santé. C'est déjà ne jamais hésiter à s'entourer et à aller chercher l'information. Ensuite, s'entourer, oui bien évidemment. Et en premier lieu, s'entourer de médecins, s'entourer de soignants qui, eux, gèrent l'éthique d'une certaine manière dans leur métier, au quotidien. Donc, oui, un conseil scientifique, c'est c'est indispensable parce que, bien évidemment, vous devez être accompagné par des médecins qui sont là depuis des dizaines d'années, qui ont les patients en face d'eux et qui vous recadre tout le temps en vous disant attention il y a des patients en face, vous n'êtes pas juste derrière votre ordinateur en train de faire des services pour faire la communication, non vous faites des services qui véritablement ont un impact dans le parcours de santé du patient. Donc vous ne pouvez pas faire n'importe quoi. Généralement, les professeurs, les médecins avec qui on travaille et on travaille avec un certain nombre d'entre eux généralement, vous cadrent assez vite sur ces sujets là et c'est une bonne chose. Et je rajouterais quand même et c'est là où je trouve que la santé numérique est passionnante, il y a un double dialogue, c'est à dire qu'aujourd'hui, dans un couloir d'hôpital, il se passe des choses dans la vraie vie qui ne sont même pas autorisées en termes en termes de santé numérique. Je prends pour témoin des dialogues entre médecins dans un couloir sur un cas patient pour trouver la meilleure solution, pour trouver le meilleur diagnostic, pour trouver le meilleur traitement.

00:26:42
Paul Louis Belletante: C'est des choses qui se font de manière naturelle parce que ces gens là respectent le patient et ne vont jamais penser à mal pour le patient. Ils ne vont utiliser toutes leurs discussions pour porter atteinte aux patients. Quand vous passez sur le côté numérique, quand vous rajouter un outil numérique dans ces discussions, dans cette réflexion entre les médecins, vous devez ajouter des mesures de sécurité en ce qui concerne les données, en ce qui concerne la confidentialité, en ce qui concerne le traitement des données. Et c'est là où, paradoxalement, c'est vous qui arrivez à contraindre les soignants à utiliser les outils suivants certaines règles d'authentification, d'identification en leur disant attention parce qu'une fois que vos discussions sont numérisées, une fois que ce que vous dites sur un patient est transformé en données numériques, ces données numériques peuvent porter atteinte aux patients. Donc, nous devons les protéger. Donc, nous devons mettre en place des mesures de sécurité qui sont définies et encore une fois PGSIS qui sont définies dans le Code de la santé publique et qui est assez intéressant parce que finalement, au départ, on commence à parler avec des médecins et ces médecins qui nous cadrent en disant attention, on ne peut pas faire n'importe quoi, il y a des patients au bout ou en fin de course souvent, c'est nous qui nous retrouvons à parler avec ces médecins et à leur mettre des contraintes en disant oui, mais dans le monde du numérique, il y a aussi ces contraintes là qui s'appliquent. Mais encore une fois, c'est l'échange qui fait que l'on arrive à créer de belles choses et c'est extraordinairement enrichissant. C'est à dire que des professeurs de médecine, des médecins et des ingénieurs arrivent à créer ensemble des services qui correspondent aux exigences réglementaires. qui correspondent à haut degré d'éthique et qui ont plus un impact positif sur la santé du patient.

00:28:24
Lionel Reichardt: Paul-Louis Belletante, pour conclure, quel conseil donneriez vous à un porteur de projet qui doit intégrer les TIC dans son projet innovant en santé?

00:28:32
Paul Louis Belletante: Tout d'abord dès le départ, de se sentir entouré, je dis bien de se sentir entouré. Je le répète, il y a beaucoup de ressources disponibles pour qu'un entrepreneur puisse lancer un projet en santé numérique en sachant assez rapidement, assez précisément ce qu'il est possible de faire ou ce qui n'est pas possible de faire. Pour moi, c'est la base encore une fois. Ça ne sert à rien de partir bille en tête avec des prototypes ou des choses qui ne considéreraient pas la particularité de la santé, la particularité des exigences réglementaires. Il faut avoir une bonne idée de ce que l'on veut faire, confronter immédiatement cette idée avec différentes personnes, avec différents textes, pour être sûr que cette idée peut être porteuse et sur cette base là ensuite, foncez, cherchez à parler avec des soignants, cherchez à parler avec des médecins, avec des infirmières qui vont vous aider à concevoir vos solutions, qui vont vous aider à déployer. Une solution de santé numérique, elle n'est pas faite pour être discutée sur Internet ou discutée dans des conférences. Elle est faite pour être dans les couloirs des hôpitaux et elle est faite pour être utilisée par des patients. Donc, il faut à tout prix, tout prix, tout prix, la chose la plus importante, c'est de se promener dans les couloirs des hôpitaux quand on peut, de parler avec des patients, de parler avec des soignants et si vous faites ça, si un entrepreneur, vraiment s'infuse du monde de la santé. Si un entrepreneur vérifie à chaque instant que ce qu'il fait est autorisé dans le cadre des exigences réglementaires après, si vous avez une bonne exécution du projet, il n'y a rien qui ne vous empêche de mettre en place un bon service qui va aider les patients à mieux vivre leur santé.

00:30:16
Paul Louis Belletante: Et puis ensuite, il faudra trouver un modèle économique. Mais je pense que ça ce sera l'affaire d'un autre épisode, d'un autre podcast. J'ajouterai en plus que l'éthique il ne faut pas voir même les exigences réglementaires, il ne faut pas voir ça comme une contrainte, comme quelque chose qui va nous embêter tout au long de notre vie d'entrepreneur. C'est la condition sine qua none pour faire en sorte que votre projet puisse être porté ensuite par des soignants, puisse être commercialisé tout court. Si vous construisez un service, si vous fabriquez un dispositif médical qui ne respecte pas les exigences réglementaires, vous n'irez jamais loin. Donc ça, c'est le premier sujet. C'est pas une contrainte, c'est une obligation. Et je m'inscris en faux contre tous ceux qui disent mais oui, mais il faut respecter l'innovation. Il ne faut pas trop réguler l'innovation, non pas en santé. En santé on n'a pas le choix que de respecter la réglementation et on peut tout à fait innover en respectant les contraintes réglementaires. Entreprendre c'est quand même créer avec les contraintes s'il n'y avait aucune contrainte ou si tout était facile, ce serait très facile d'entreprendre. Entreprendre, c'est créer quelque chose en fonction des contraintes que l'on a. Donc le réglementaire n'est pas une contrainte, c'est une obligation. Mais j'insiste aussi sur une chose il y a quand même deux points extrêmement positif. C'est que de un ces règlements vous aident à faire les choses bien. Il ya quelque part votre responsabilité qui est engagée dans ces dispositifs médicaux ? Vous pouvez quand même être plus ou moins sûr que lorsque vous respectez les contraintes réglementaires des exigences réglementaires , votre service est apte à être mis sur le marché. Vous pouvez vous être déjà rassuré et deuxièmement, je finis peut être sur une lueur d'espoir, suivre les réglementation c'est aussi un extraordinaire moyen de se différencier sur un marché où il y a énormément d'acteurs et où un très grand nombre d'acteurs aujourd'hui, malheureusement, traitent les exigences de la compliance avec les exigences réglementaire, je pense pas de la bonne manière et aujourd'hui, force est de constater que quand vous allez parler à un soignant, quand vous avez parlé à un établissement de soins, quand vous allez parler à une ARS, à une région, un ministère, le fait d'arriver en disant on est certifi, on a des dispositifs médicaux qui sont certifié classe 1, classe 2A auprès de la NS ça a crédibilise votre discous et bon nombre d'acteurs vous disent commencent vraiment à vous dire, c'est pour ça que j'insiste vraiment pour tous ceux qui entreprennent sur ce marché là. Tout le monde est en train de se rendre compte que c'est effectivement une obligation et toutes les sociétés qui font de laanté e numérique, qui n'ont pas considéré encore à ce jour l'importance des exigences réglementaires, devraient véritablement se pencher sur la question, car un, elles n'ont pas le choix et deuxièmement, ce faisant, il va y avoir vraiment une prime aux sociétés sur ce marché qui sont totalement compliantes avec les exigences réglementaires.

00:33:19
Lionel Reichardt: Paul-Louis Belletante Merci pour cet éclairage. Notre épisode touche à sa fin. Merci de nous avoir écoutés. Nous remercions nos deux invités pour leur disponibilité ainsi que vous pour votre écoute. N'hésitez pas à vous abonner au podcast sur les plateformes d'écoute. Nous vous donnons rendez-vous très bientôt pour un nouvel épisode de "cent jours pour réussir".

00:33:40
Voix off : Celles et ceux qui font la santé d'aujourd'hui et de demain sont sur le podcast de G_NIUS et toutes les solutions pour réussir sont sur gnius.esante.gouv.fr

 

Description

Avec Paul-Louis BELLETANTE (Betterise) et Brigitte SEROUSSI (Délégation ministérielle au Numérique en Santé).

Pour ce cinquième épisode, “100 Jours pour réussir” fait le focus sur l’intégration de l’éthique dès la construction d’une solution innovante en santé. 

Avec le témoignage de Paul-Louis BELLETANTE, fondateur et dirigeant de Betterise, une plateforme de services digitaux en santé.

Retrouvez également Brigitte SEROUSSI, professeure des universités, praticien hospitalier à l’AP-HP et chargée de mission au sein de la cellule éthique de la Délégation ministérielle au Numérique en Santé.